Éoliennes offshore. Ornithologues « De grosses inquiétudes »

Article du Télégramme, 23 septembre 2014, Julien Vaillant.                                                                Le Groupe d’études ornithologiques des Côtes-d’Armor (Geoca) s’est prononcé contre le projet de parc éolien. Interview de son chargé de mission, Yann Février.

Le Télégramme : Pourquoi le Geoca s’est-il prononcé contre le projet ?

Yann Février : « Normalement, les conclusions de l’étude d’impact devraient conditionner la construction du parc, mais nous avons le sentiment que le projet se fera quelles que soient les conclusions. Tout est d’ailleurs déjà hyperprogrammé : la zone d’installation du parc, le type de machine, leur position. Et tout ceci a surtout été décidé en fonction du gisement de vent. Ce n’est pas propre au projet de Saint-Brieuc, mais l’étude d’impact va surtout avoir un rôle d’acquisitions de connaissances, alors que, selon nous, cette étude aurait dû servir à préciser la zone et le type de machines. »

Quelles sont vos inquiétudes ? « Prenons l’exemple du plongeon imbrin. C’est une espèce rare et fragile. L’étude d’impact a permis de découvrir que ces oiseaux vivaient au large, alors que nous ne les attendions pas là. Aujourd’hui, nous craignions que cette espèce disparaisse avec l’arrivée du parc éolien. De manière plus générale, personne ne mesure les effets cumulés. Il y aura quatre parcs sur la Manche et d’autres en mer du Nord. Les oiseaux migrateurs qui partent de Scandinavie pour aller vers l’Atlantique vont rencontrer toutes ces éoliennes. Et cela nous inquiète fortement. Il a bien sûr l’impact direct – les collisions -, mais aussi et surtout les impacts sur la perte d’habitation, ainsi que les zones de repos et d’alimentation des oiseaux et mammifères marins. Nous n’avons pas de preuves de ces éventuels impacts, mais pas de réponses claires non plus. »

Que peut-il se passer à l’arrivée des éoliennes ?  « Nous savons déjà que quand les travaux vont démarrer, tous les mammifères marins vont déserter la zone. C’est même tout le golfe normand breton qui va être impacté. Nous avons ici la plus importante population européenne de grands dauphins. S’ils vivent ici, c’est qu’il y a une raison. Ailleurs, ils sont en concurrence avec d’autres espèces et ils ont moins de nourriture. Les faire partir de leur milieu pourrait avoir des conséquences dramatiques. »

Quelles mesures le porteur du projet peut-il prendre ?  « La loi prévoit des mesures dites ERC (évitement, réduction, compensation) pour ce type de projets. Mais les mesures d’évitement et la réduction sont impossibles à mettre en oeuvre. Ce n’est pas tenable économiquement d’arrêter temporairement les éoliennes pour des oiseaux migrateurs. Il reste donc la compensation. En milieu forestier, lorsqu’on abat des arbres, il s’agit d’en replanter le double. Mais sur le milieu marin, on ne sait pas faire. Ailes Marines ne va pas donner d’argent aux dauphins et aux oiseaux. Ils peuvent bien sûr financer des projets. Mais on ne peut pas tout acheter avec de l’argent. »       © Le Télégramme – Plus d’information sur http://www.letelegramme.fr/cotes-darmor/saint-brieuc/eoliennes-offshore-quel-impact-sur-le-vivant-23-09-2014-10353276.php

___________________________________________________________________________________________________________N’oublions pas que les études d’impact actuellement menées sont entièrement définies, financées, gérées, et seront publiées par le porteur du projet en Baie de Saint-Brieuc, Ailes Marines.

D’autre part, comment expliquer l’implantation d’une usine électrique de plus de 200 mètres de hauteur sur 8 000 hectares, en amont de la plus grande Réserve de Bretagne, la Réserve naturelle de la baie de Saint-Brieuc, un des plus fort statut de protection en France ?  « Scindée en deux anses (l’anse d’Yffiniac et l’anse de Morieux) qui forment une zone humide d’intérêt international, elle a été classée Réserve naturelle en 1998 car elle assure la protection d’une faune et d’une flore qui prospèrent en toute tranquillité. Depuis toujours carrefour de migration, certains oiseaux aiment à y faire étape tandis que d’autres y ont élus domicile pour leur nidification. Au gré des sentiers de la Baie et selon les époques, ce ne sont pas moins de 40 000 oiseaux de 112 espèces différentes qui peuvent être observées à loisir. » http://www.baiedesaintbrieuc.com

La mortalité des oiseaux victimes d’éoliennes est pourtant bien documentée dans les pays où l’éolien industriel est installé de longue date, Etats-Unis, Danemark, Norvège, Allemagne, Espagne, Royaume Uni. En dépit de ce que communique l’industrie éolienne, les dégâts sont bien là : mortalité par collision, diminution des densités de population, baisse de la reproduction, abandon des habitats. Outre les perturbations engendrées par la présence même des éoliennes (modification du milieu, dérangement humain), les conditions climatiques, pluie, vents de face, nuits sans lune, les comportements de chasse, de vol, augmentent les risques. Les espèces à vol plané sont dépendantes des courants aériens et des ascendances thermiques. Et l’accoutumance aux éoliennes est également un risque pour les espèces, les utilisant comme perchoirs d’observation, avec l’attention centrée sur la recherche de proies et détournée de la présence des pales.

UK, Ile de Harris, The Telegraph, 27 juin 2013, Simon Johnson,  http://www.telegraph.co.uk/news/uknews/scotland/10146135/Birdwatchers-see-rare-swift-killed-by-wind-turbine.html

Les espèces protégées sont victimes des éoliennes. Ce serait presque comique si ce n’était pas si triste et inutile : « C’est tragique (…) l’oiseau a juste volé droit sur l’éolienne. Il a été tué sur le coup. »

The Telegraph, Martinet épineux« Sur l’île de Harris, 40 personnes observaient un martinet épineux, l’oiseau le plus rapide en vol du monde lorsque la tragédie s’est produite. L’oiseau n’a été recensé que huit fois au Royaume-Uni en près de 170 ans, la dernière fois en 1991, provoquant la visite de 80 ornithologues sur l’île dans l’espoir de l’apercevoir. John Marchant, coordonnateur pour le British Trust for Ornithology, était là, dans le cadre d’un voyage spécialement aménagé avec un groupe d’autres ornithologues : « Nous étions absolument sur ​​la lune et ravis de voir l’oiseau. Nous l’avons observé pendant près de deux heures. Alors que nous regardions, tout à coup, il s’est rapproché de la turbine, puis a heurté les pâles. Nous avons tous couru vers la turbine, ce qui a pris environ cinq minutes, en espérant qu’il venait simplement d’être assommé. Malheureusement, il avait reçu un coup sur la tête et était raide mort. » (…) Josh Jones, guide d’oiseaux spécialisé pour les ornithologues : « Il est ironique de constater qu’après avoir attendu si longtemps le retour de cet oiseau au Royaume-Uni, il a été tué par une éolienne et non par un prédateur naturel. »(…)« Il a été tué sur le coup. Le cadavre sera envoyé à un musée, mais évidemment, cela est tout simplement terrible « .

En Ecosse, le collectif Windfarmaction http://windfarmaction.wordpress.com/birds/

Windfarmaction

En Espagne SEO/BirdLife presenta una nueva guía para la evaluación del impacto de parques eólicos en aves y murciélagos, Publicado el 12/01/2012 por SEO/BirdLife    En 2012, la Société Espagnole d’Ornithologie a exigé du gouvernement espagnol des rapports jamais rendus publics. L’analyse d’une centaine de rapports sur plusieurs années révèle que 18 000 éoliennes espagnoles tuent selon les année 6 à 18 millions d’oiseaux et de chauves-souris par an, soit 333 et 1000 morts par éolienne chaque année. Des statistiques éloignées de façon chocante des chiffres annoncées par les industriels de l’éolien.

BLN NewsAux USA : BLN News   http://blnnews.com/2012/10/09/liberal-minds/   9 octobre 2012, après la condamnation par un tribunal fédéral de 7 compagnies pétrolières pour 28 oiseaux migrateurs morts : « Les compagnies pétrolières font face à de lourdes amendes, les parcs éoliens obtiennent un laissez-passer gratuit (…) L’association Fish and Wildlife estime qu’en 2009 environ 440 000 oiseaux ont été tués par les éoliennes aux USA. Pourtant, l’industrie éolienne n’a pas eu une seule condamnation. »

WCfN, World Council for Nature, accuse l’Union Européenne de laisser implanter des usines éoliennes dans les ZPS et les zones Natura 2000.